Les Pyrénées autrefois
Il est des noms que l'on a plaisir à dire, à lire, à écouter, à
répéter.
Il est des noms qui ont tout à la fois
pour les yeux, pour l'oreille et pour le cœur,
leur image, leur couleur et leur musique.
Il est des noms magiques.
Il est des noms qui chantent et qui dansent.
Et il me semble bien que Pyrénées est un de ces
noms
et sans doute même est-il, de tous ces noms,
le plus mélodieux et le plus harmonieux.
Peut-être parce qu'il vient de Pyrène,
jeune et belle vierge, fille d'un roi barbare,
qu'Hercule séduisit au temps de ses exploits en
Méditerranée.
Fuyant son père courroucé Bébryx, roi d'Ibérie,
Pyrène gagne la montagne anonyme
où des bêtes sauvages la dévorent à belles
dents.
Mais Hercule retrouve sa dépouille et lui donne une
sépulture
tout au sommet de la montagne sans nom
qu'il baptise du nom de sa défunte conquête.
Tout le monde n'est pas d'accord sur l'origine du
nom,
mais ils sont nombreux à penser que Pyrénées
vient du grec pur, puros qui signifie le feu.
Et selon Diodore de Sicile,
c'est parce que leurs pics sont pointus comme des
flammes
et souvent frappés par la foudre
que les Pyrénées ont reçu ce nom.
Dans son sillage,
Michelet n'a-t-il pas appelé les Pyrénées,
« les filles du feu ».
C'est par leur harmonie que les Pyrénées,
« montagnes civilisées » encore appelées « montagnes divines
»,
séduisent l'œil.
C'est par leur charme que les Pyrénées
attirent l'homme, le fascinent et le
subjuguent.
Parcourons-les de l'Océan à la Méditerranée :
du Pays basque au ciel vaporeux et voilé
à la luminosité éclatante du Pays catalan.
Comme Russell promène son lecteur
« longitudinalement de l'ouest à l'est
d'un bout à l'autre des Pyrénées ».
Pénétrons-les jusque dans leurs gorges, leurs cirques, leurs
défilés,
leurs brèches, leurs gouffres et leurs abîmes.
Gravissons leurs monts, leurs crêtes, leurs
arêtes,
leurs cimes et leurs pics.
Écoutons le bruit des cascades lointaines,
des torrents et des gaves bondissant sur des lits de
pierres.
Pays basque au régime océanique où dominent
le vert des prairies bien grasses
et le brun d'épaisses forêts.
Peuple intelligent, agile et bondissant
qui aime chanter et danser le fandango aux pieds des
monts.
Béarn au beau ciel bleu avec Pau, berceau d'un
roi,
d'où l'on aperçoit les Pyrénées
comme de nulle part ailleurs.
Stations thermales aux noms évocateurs :
Cauterets, Luchon, Bagnères, Barèges, Capvern,
Saint-Sauveur.
Vallées surplombées par des pics élancés :
VIgnemale, Marboré, mont Perdu, pics du Midi de Bigorre et
d'Ossau.
Lieux privilégiés qui, au long des siècles,
et ont servi de cadre
à tant d'aventures sentimentales et amoureuses
et ont inspiré écrivains et poètes.
Depuis la minuscule Andorre qui parle déjà le
catalan,
le relief s'abaisse insensiblement jusqu'à la
Méditerranée.
Les vieilles provinces du Roussillon et de la
Cerdagne
ont su conserver leurs mœurs et leur caractère
tout comme le Pays basque, leur pendant.
Perpignan et son Castillet,
sans doute la ville la plus gaie de France
au temps du carnaval,
où filles et garçons dansent la sardane au son de la
cobla,
sous des platanes centenaires,
avec dans le lointain le vieux Canigou
dont les cimes enneigées scintillent dans
l'azur.
Pyrénées originales et uniques,
Seule région au monde où l'on peut encore à la
fois
être témoin d'un miracle et rencontrer un ours.
La simple vision d'un ours
Sera d ailleurs bientôt considérée comme un vrai
miracle.
« Pyrénées, écrit Horace de Viel-Castel, ce pays aimé de
Dieu,
où le reste de la France se rend une fois en sa
vie,
comme les musulmans se rendent à la Mecque. »
Michelet vante « la fantastique beauté des Pyrénées
»
tandis que le poète palois, Paul-Jean Toulet écrit
:
« On voit bien que le Bon Dieu
s'est mêlé lui-même de les faire
au lieu de les confier à ses domestiques. »
Russell, considérant la montagne pyrénéenne ,
comme sa véritable épouse,
déclare le plus naturellement du monde :
« Quand j'arrive près d'elles,
je crois qu'elles me reconnaissent. »
« Elles peuvent même, ajoute-t-il,
donner aux saints du ciel la nostalgie de la terre.
»
Pyrénées enfin, profondément comblées par la
nature
et prodigieusement humanisées par l'homme,
à propos desquelles l'écrivain Louis Bertrand a pu écrire
:
« J'ai la faiblesse de croire que les Pyrénées
sont les plus belles montagnes du monde
car il est malaisé de trouver un sol plus
pénétré
d'humanité, d'art, d'histoire, de poésie et de
légende.
En tout cas, il me semble que nulle part
le paysage français n'atteint à pareil accent.
»
II est temps maintenant
de pénétrer dans l'intimité de nos ancêtres
pyrénéens
et de parcourir cette chaîne d'un bout à
l'autre
pour satisfaire votre curiosité et votre
sensibilité.
A votre tour d'être conquis par leur charme
magique
et de tomber follement amoureux des Pyrénées du temps
passé.
Source autrefois les Pyrénées Claude Bailhé.
Le Pèlerin